Traduire / Translate

lundi 26 janvier 2015

Dette : la Grèce va-t-elle rembourser la France ?





C’est LA question à la con que se posent désormais, non sans un chouïa de nombrilisme malveillant, ceux qui ont encore un peu de difficultés, même dans la France de 2015, à admettre le principe base de la démocratie qu’on va donc énoncer une nouvelle fois : à l’issue d’un vote, celui qui a remporté le plus grand nombre de suffrages est déclaré vainqueur de l’élection.

Ayant du mal à déglutir sans douleur depuis qu’ils ont appris la spectaculaire victoire de Syriza en Grèce, certains s’interrogent à peu près en ces termes : « mon Dieu, ma pauv’ Lucette, mais combien va-t-il nous coûter l’éventuel défaut grec » ?

C’est vrai : c’est pile le bon moment pour se poser pareille question. C’est élégant comme tout. Et généreux, en plus. Dommage que Margaret Thatcher ne soit plus de ce monde car elle aurait adoré ce bouleversant cri du cœur : « I wan’t my money back » !

Il y a d’abord eu l’autre question, un peu moins vénale : celle de savoir pourquoi et comment il était possible qu’Alexis Tsipras s’aventure à former une coalition avec la droite souverainiste des Grecs Indépendants.

Attention, on va donner la réponse (gratuitement, faut vite en profiter !). Si Tsipras a fait ça, c’est pour manifester un choix clair, pour témoigner qu’il a une priorité, qui consiste à négocier avec l’Europe. En gros, il a compris que toute politique s’inscrit désormais dans un cadre, qui est le cadre européen. Et qu’il faut donc avant toute chose commencer par bousculer le cadre. Le reste, on voit après.

                                             Alors, il est pas beau, le pot-aux-roses ?


Et maintenant, passons à LA question. La Grèce va-t-elle rembourser l’argent qu’elle doit à la France ?

Ah ben zut alors, on ne sait pas encore !!

Mais, petite question subsidiaire, POURQUOI la Grèce doit-elle de l’argent à la France ? Voici quelques éléments de réponse.

Pour mémoire, la dette grecque est évalué à un montant de plus de 300 milliards d’euros, dont environ 70% sont détenus par des créanciers publics qui sont les Etats membres de la zone euro ayant accordé des prêts bilatéraux (53 milliards environ), la Banque centrale européenne, le FMI, le mécanisme européen de stabilité (MES). A noter que les prêts consentis par le MES sont garantis par les Etats en fonction de la taille relative de leur économie. Le Top three des principaux garants est donc dans l’ordre : Allemagne, France, Italie. Ce sont eux qui paieront le plus. 

Comment diable en est-on arrivé là ?

C’est assez simple. La Grèce a déjà fait défaut par le passé. A l’époque, ce sont ses créanciers privés qui ont encaissé les pertes. On a appelé ça le « haircut ». C’était normal, c’est le jeu. Quand on est « les marchés » on a un métier qui consiste à prêter « à risques ». Et quand on prête « à risques », cela signifie qu’il y a…. des risques. Mais cette prise de risques est rémunérée par les taux d’intérêts (parfois exorbitants) qu’on exige de ses débiteurs. Quand on est « les marchés », le plus souvent on gagne, mais parfois on perd. Et si on n’est pas d’accord avec cette règle du jeu, on se cherche un autre boulot !

Oui mais voilà. Depuis le « haircut », tout le génie de la technocratie européenne a consisté à sortir la Grèce des marchés et à transférer le risque du secteur privé vers le secteur public. Allez, c'est le moment de claquer un petit extrait de "Europe, les Etats désunis" pour préciser la chose :

Faut double-cliquer sur l'image pour la faire grossir

Cela a été fait non par inadvertance mais de façon tout à fait volontaire et tous les pays membres de la zone euro ont accepté de jouer à ce petit jeu, notamment en acceptant la mise en place du FESF puis du MES et les modalités de leur fonctionnement. C’est la raison pour laquelle « le contribuable européen » (le fameux) pourrait finir par se voir présenter la facture. C’est sur lui, désormais, que repose le risque qui planait jusque-là (mais contre rétribution) sur la tête « des marchés ».


Alors, il est pas beau, le pot-aux-roses ?

Ça fait quoi de le découvrir aussi tard ? Pourquoi cela n’a-t-il pas été débattu avant ? Démocratiquement, tout ça ? Pourquoi toute cette cuisine européenne n’est-elle plus transparente ?

C’est peut-être ça, au bout du compte, LA vraie question….

9 commentaires:

  1. Mais ma pauv' Lucette tout cela est bien connu tant que l'on se préoccupe un peu plus du fond que de la forme.
    Le problème de la majorité des français est qu'ils vivent l'information comme une novella brésilienne, à grand coup d'émotion et de ça seulement.
    Leur ignorance est patente que ce soit en économie, en politique, en géo politique, seul compte le frisson du 20h avec des journalistes qui sont au Journalisme ce que les acteurs des Feux de l'Amour sont à L'Actor's Studio.

    Ce sont les mêmes qui défilaient dans les rues hurlant leur joie face la liberté déclenchée lors du printemps arabe, les vilains destitués et la gentille démocratie enfin là. Sans se douter que tous les extrémistes islamiques feraient main basse, charia incluse dans tous ces pays mettant l'Afrique et le Monde à feu et à sang. Alors que sans être expert, l'arrivée des islamistes et ses multiples conséquences était largement prévisible.
    Les mêmes qui qui défilaient dans les rues hurlant leur joie face la liberté déclenchée par l'élection d'un Hollande menteur comme un arracheur de dent alors qu'il était factuellement prévisible qu'il emmena notre pays là ou il est, sans perspective d'amélioration aucune.
    Les mêmes qui défilent dans les rues hurlent leur joie face la liberté déclenchée par la victoire de la gentille extrême gauche Grecque opprimée sous le joug de la vilaine Allemagne et des banques. Des Grecs qui ont poussé l'art de la fraude d'Etat et politique à son plus haut niveau afin de rentrer dans l'Europe pour faire main basse sur les richesses présumées.
    Fort d'une première réussite, Tsypras compte refaire le même coup et faire les poches de toutes les braves Lucette qui défilent à sa Gloire aujourd'hui.

    Pour répondre à la question à la con, fort de ces éléments bien sur que la Grèce ne va pas rembourser la France et les français qui vont sans doute s'asseoir sur une part colossale de la dette non indue des Grecs.
    Et tout cela politiquement pour préserver les benêts que nous sommes majoritairement et qui servent si bien les intérêts de nos "zélites". On fera passer cette enième pillule sous couvert d'émotion, de grandes valeurs, d'espoir et de liberté. Il parait qu'un bisou dans le cou avant une sodomie rend cette dernière plus supportable.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Vous savez, les cons, les naïfs, les ignorants, c'est toujours pareil : c'est toujours les autres. Bof, bof.... Désaccord là dessus.
      "Les gens" ne sont pas plus bêtes que vous et moi.

      Supprimer
  2. Au moins ce qu il y a de bien avec ce genre de questions, c est qu on toucheles limites de l utopie fédéraliste.
    Le pire c est que ce sont souvent ceux qui veulent le fédéralisme qui se plaignent de devoir être solidares entre peuples. Ca me dépasse... Je ne sai spas de quel fédéralisme ils parlent s ils ne veulent pas de transfert entre les états.

    RépondreSupprimer
  3. Une idée du montant des intérêts dans les 321 milliards de la dette grecque?
    Personne n'en parle, à croire que personne ne le sait.
    Si on part du principe où l'on ne demande qu'à la Grèce de rembourser l'argent prêté sans les intérêts qui lui sont demandés et à hauteur seulement des intérêts engagés par les pays européens (1% je crois), concrètement combien la Grèce devrait-elle rembourser?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Vous voulez la mort des banquiers ou quoi ?

      Supprimer
  4. @Coralie Delaume,
    pour ce qui est d'Anonyme, vous avez bien raison: le mépris de ses propres concitoyens (et par ricochet, un surplus d'égo...) ça ne fera pas avancer le schmilblick!
    Sinon, concernant le MES (ESM dans mon boulot), le truc est assez simple: c'est la fameuse astuce du Baron de Münchhausen, qui consiste à se sortir des sables mouvants en se tirant les cheveux vers le haut (ou les bottes, mais ça varie en fonction des versions...).
    En fait, le problème, c'est que depuis plus de trente ans, et donc la financiarisation de notre économie, un sous n'est plus un sous, et donc, quand vous dites à votre gouvernement que plus de 150 milliards d'euros, comme c'est le cas pour la France, seront mobilisables A LA DEMANDE (ce sont bien les statuts du MES qui le spécifie), personne ne moufte, car il y a désormais une déconnexion entre l'argent, tel qu'il manque aux couches populaire, et nos élites!
    C'est dur à admettre, mais quand on travaille dans la finance comme c'est mon cas, j'arrive à comprendre qu'un chiffre aussi abstrait passe comme une lettre à la poste, car on part du principe que cela ne se produira pas, même après le bouillon de septembre 2008!
    Finalement, en phase de décadence morale, nos élites n'ont pas tant changé que cela depuis que la Pompadour a déclaré à son royal amant Louis XV: "après nous, le déluge"...

    CVT

    RépondreSupprimer
  5. Mais je me pose une question :
    La dette, oui la dette c'est quoi exactement ?
    Est-ce des espèces sonnantes et trébuchantes prêtées après un fonctionnement d'enfer des planches à billets d'Europe ou de France et de Navarre ?
    Est-ce de la monnaie scripturaire allouée en veux-tu en voilà après ouverture d'une ligne budgétaire...
    Et si c'est bien ce dernier cas, cela ne serait-il pas de l'argent qui ne repose sur rien (en tout cas pas sur des réserves d'or ou d'argent insuffisantes) ? quelques lignes budgétaires qui pourraient être gommées sans plus d'effets qu'un pet de vache (d'un seule car sinon attention au réchauffement climatique...)

    RépondreSupprimer
  6. Tout ça est tout à fait vrai mais je ne vois pas où vous voulez en venir : aurait-il mieux valu ne pas mettre en place le FESF puis le MES et laisser la Grèce sombrer ?

    Votre rappel des faits est exact mais je perçois mal le message derrière. Il me semble que ce qui a été fait devait l'être, on peut surtout déplorer qu'il ne l'ait pas été plus tôt.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Non, il ne faut pas laisser la Grèce sombrer. Il faut accepter son défaut, pour qu'elle puisse repartir sur des bases plus saines. On encaisse la perte, basta. Ça nous coûtera mais on doit bien ça à ce pays qu'on a ruiné et qui, malgré tout, vient de nous redonner une belle poignée d'espoir.
      Et puis comme il se trouve que de toute façon on n'a pas vraiment le choix...Autant le faire avec le sourire !

      Supprimer